François d’Haéne, vainqueur du grand Raid de la Reunion, nous revient avec son actualité chargée et ses objectifs pour cette année. Cet athlète du Team Salomon est surprenant par sa régularité et sa sympathie…
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François D’Haene dispute le 25 avril au Japon le 168 km et 9500 m de dénivelé positif de l’Ultra Trail du Mont-Fuji, étape de l’Ultra Trail World Tour. Côté Français sont également annoncés : Nathalie Mauclair, Sébastien Chaigneau, Vincent Delebarre, François Faivre, Emmanuel Gault, Antoine Guillon, Christophe Le Saux, Thomas Lorblanchet… Avant son premier gros rendez-vous 2014, François D’Haene parle de cette aventure sportive au Pays du Soleil Levant, de sa passion du trail, de son bilan 2013 et de sa saison en cours. François D’Haene, team Salomon, 28 ans, 1,92 m, 80 kg, est né à Lille. Masseur kinésithérapeute et exploitant viticole, il partage sa vie entre les montagnes des Alpes et le Beaujolais où se trouvent ses vignes au domaine du Germain. Il a pratiqué longtemps l’athlétisme et plus particulièrement le cross country tout en accordant une grande importance aux activités extérieures en montagne telles que le vélo, le ski alpin, randonnée et fond, le canyoning et l’alpinisme… En dehors du trail il s’adonne toujours aux sports outdoor montagne été et hiver.
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« Nous devons faire attention à préserver l’éthique et l’essence du Trail »François d’Haéne.
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Retrouvailles avec le Japon…
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« J’ai déjà couru au Japon en novembre 2010 sur le 40 km du Kanna Mountain que j’avais remporté. J’y retourne avec plaisir. Je vais donner le maximum sur l’UTMF pour jouer avec les adversaires et essayer de rester au contact de la tête de course le plus longtemps possible ! Ce ne sera pas chose facile, le plateau international annoncé est très relevé. Je pars un peu dans l’inconnu, c’est la première fois que je m’engage sur une si longue distance aussi tôt dans l’année et avec aussi peu de sorties longues en courant. J’espère que la fraîcheur et l’enthousiasme combinés avec l’expérience que je commence à avoir de mon corps et en ultra trail, me suffiront pour prendre du plaisir sur les pentes du Mont-Fuji ! Je pense être en bonne forme, après un très bel hiver où je suis monté progressivement en puissance. Depuis la fin mars, j’ai repris sérieusement le trail avec un peu de ski de randonnée quand l’appel de la neige s’est fait trop fort et des belles sorties dans le Mercantour et le Beaujolais. Le 13 avril, pour achever ma préparation, j’ai pris le départ du 62 km du Beaujolais villages Trail. Ce fut une très belle course que j’ai remporté en essayant de ne pas griller toutes mes cartouches ! »
Sa découverte du trail est passée par une envie grandissante de s’échapper des compétitions trop structurées qu’il faisais en athlétisme. Naturellement tourné vers le trail running qui lui semblait être le moyen le plus simple d’être en adéquation avec ses besoins de liberté en montagne, il trouve le plaisir et la compétitivité. Le trail running lui a offert la possibilité de vivre et partager sa passion tout en restant lui même et en conservant sa vie sociale et son hygiène de vie. Le premier grand trail il a participé a été le tour des glaciers de la Vanoise, une victoire qui reste pour lui un très beau souvenir.
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François, tes préférences ?
« J’aime bien l’ultra trail pour tout ce qu’il implique en termes de gestion, mais je suis assez ouvert à des distances variées. L’essentiel est de ne pas trop m’éloigner de la montagne ! Plus l’environnement est difficile et plus je suis motivé. J’apprécie les chemins tortueux, rarement plats, tantôt en herbe, en sable, en forêt ou en pierrier, parfois en neige, sec ou boueux mais toujours étroits. Ce qui me paraît le plus important c’est que le trail reste en adéquation avec l’endroit où il se trouve c’est-à-dire qu’il y ait une certaine logique dans la création de l’épreuve. Les organisateurs doivent nous faire partager un parcours qu’ils apprécient. Je ne pense pas qu’il puisse juste être mis en place pour un trail et par exemple composé artificiellement de boucles. Nous devons faire attention à préserver l’éthique et l’essence du trail. Continuer à partager tous le même départ et la même course et l’un des points importants. »
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Parles-nous de ton état d’esprit, de tes atouts ?
« Lorsque j’aborde une course, l’envie et l’excitation viennent autant de mon besoin de découvrir de nouveaux paysages et sentiers que de celui de me confronter aux autres et à leurs stratégies. Sur un ultra il faut parfois ne pas regarder les concurrents et se concentrer sur soi et ses sensations, alors que sur des courses plus courtes on ne peut pas se permettre de ne pas tenir compte des autres. La chose principale me semble être d’avoir envie d’être au départ, de trouver du plaisir durant la course et dans la période de préparation de celle-ci. Dans ce cas seulement elle se passera bien… Il est toujours difficile de se juger, mais je pense que j’arrive bien à gérer les courses assez longues en terrain montagneux et me sens un peu avantagé par rapport aux autres au bout de 4 à 5 heures. Mes points forts sont je pense le fait d’être un coureur assez homogène en montée, descente, plat, longue distance, endurance, vitesse et mon envie de me confronter aux éléments naturels et à la montagne. »
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Saison 2013 et 2014 ?
« J’avais scindé ma saison 2013 en deux. Une première partie avec des voyages magnifiques au Chili, Nouvelle-Zélande, Etats-Unis, une sixième place à la Transvulcania, une victoire au 80 km du Mont-Blanc partagée avec Michel Lanne et une deuxième place à l’Ice trail tarentaise. Une belle entame de saison même si on rêve toujours de mieux ! Mes priorités ensuite étaient le Grand Raid de la Réunion que je remporte et le TNF 50 de San Francisco, mais malheureusement je me suis blessé 3 jours avant. En somme une grande année pour moi avec beaucoup de plaisir et de joies, quelques regrets mais qui seront source de motivation pour plus tard… à refaire ! Cette année, après l’Ultra trail du Mont Fuji, je serai au départ des championnats du monde sur le 80 km du Mont-Blanc puis de l’Ice trail Tarentaise. Si ma récupération se passe bien j’envisage ensuite d’essayer d’enchaîner l’Ultra trail du Mont-Blanc et le Grand raid de la Réunion, ce qui représentera mon gros challenge annuel. Il me restera alors je l’espère à venger mes regrets sur le TNF 50 à San Francisco. Je m’entraîne 4 à 8 fois par semaine selon la durée et l’intensité. Je dois aussi jongler avec mon travail dans la vigne. Certaines journées sont très physiques et me fatiguent beaucoup. Elles prennent alors la place d’un ou plusieurs entraînements. Selon la distance de la course à préparer et mes besoins, je privilégie un type d’entraînement ou filière sur laquelle travailler. J’essaye aussi de varier en faisant d’autres sports, mais ce que je préfère ce sont les sorties longues dans un secteur ou un massif où je pars en allant où je veux et le temps que je veux! M’entraîner à plusieurs me plaît beaucoup mais ça n’est pas toujours évident de trouver quelqu’un pour aller courir 6 heures. En conséquence, je me suis habitué à courir souvent seul. J’ai un conseiller entraîneur qui est Christophe Malardé. On essaie de définir nos grandes lignes de conduite et je parle aussi de ma planification avec pas mal d’autres personnes : mon ancien entraîneur, mon team manager Jean-Michel Faure-Vincent et mes amis. »
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Tes joie, déception, échecs ?
« Premier trail, différentes victoires, UTMB, Grand Raid de la Réunion ? Il m’est trop difficile de faire des choix entre des tas de moments de bonheur qui ont tous leur place dans ma mémoire. Les blessures qui m’empêchent de courir ou encore pire de faire du sport sont mes plus grosses galères, déceptions et souffrances… Quand on ne comprend pas ou qu’on n’arrive pas à se sortir d’une blessure, il est très dur de retrouver ce plaisir et ces sensations qui nous permettent d’être nous même et de se sentir bien socialement. Le sport tient une place très importante dans ma vie et son absence déteint forcément sur mon humeur. Avec le temps on apprend à mieux gérer un échec, à ne plus focaliser une saison sur un seul évènement et surtout à relativiser, à regarder autour et derrière soi mais cela reste très dur et demande toujours un petit temps pour arriver à rebondir vraiment. Il est parfois facile de faire face devant les gens, mais intérieurement cela prend souvent beaucoup de temps. »
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Crédit photos Damien Rosso : www.droz-photo.com
Remerciement article : Robert Goin.
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