Mickaël a eu l’occasion de tester le Trail Cenis Tour dans le massif de la Vanoise. Trail Session revient sur son compte-rendu aiguisé ! Focus !
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L’été est arrivé sur La France, après une Coupe de France de Trail Universitaire en demie-teinte début juin, et un mois de Juillet à essayer de retrouver des sensations, il était temps de se tester sur une longue distance pour situer l’état de forme avant La Mascareignes à La Réunion en fin octobre. Après avoir obtenu une invitation de l’organisation de l’EDF Cenis Tour je décidais de m’aligner sur 50kms. Une distance parfaite car ni trop longue pour épuiser le corps mais suffisamment pour obtenir quelques réponses. La date aussi semblait parfaite, début août, elle permettait même de proposer aux compagnons routards et pistards du club de venir s’initier sur les distances plus courtes.
Ainsi, par la chaleur étouffante d’un vendredi matin à Paris, nous voilà en direction de Modane avec 6 de mes complices du club de l’AC Paris Joinville. Ça rigole, ça braille (merci Julie), çà essaie surtout de cacher son stress d’avant course. Mon ventre me joue des siennes depuis plusieurs jours et la douleur augmente au fur à mesure que la course approche. C’est une donnée que je n’arrive pas encore à maîtriser et qui m’inquiète pour La Mascareignes, où je compte passer plus de 10 heures sur les sentiers.
Arrivés sur place on s’imprègne des lieux et on fait les dernières courses avant de prendre le départ dimanche matin.
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9h ça y est les dingos sont lancés, un départ groupé de 600 coureurs répartis sur les 3 courses : 15, 30 et 50kms. J’ai décidé de partir prudent. Cela fait plus de 6 ans que je n’ai pas couru pareille distance et le dénivelé me fait peur…2600m à grimper ce n’est pas une mince affaire. Les 5 premiers kilomètres sont assez roulant, ça grimpe mais léger. J’avais décidé de partir avec Julie et Boris, les deux potes inscrits sur le 30 kms. Cependant, le rythme est trop léger pour moi et je me retrouve même à passer les copains présents sur le 15. J’en profite pour leur lancer des encouragements, mais ils sont concentrés dans leur course. Très vite le terrain s’élève…pouah ! Ça va être long…Je regarde sur ma RC3 GPS où j’en suis dans la distance et le dénivelé. J’ai encore 5kms à courir pour grimper 800m de dénivelé. De toute façon pas moyen d’accélérer dans cette immense chenille humaine, et surtout hors de question de ralentir. Les jambes sont là ce matin, tant mieux j’avais besoin d’elles !
Arrivé au sommet de cette première difficulté j’ai 5 kms de faux plat descendant pour rejoindre le premier ravito situé au 15e km. Je le rejoins en 2h pile, objectif prévu sur la carte de route. Tout va bien donc. Je ravitaille, miam miam, et hop je repars. Ah mais ça grimpe ici bordel ! Le ravito se situe en réalité au pied d’un mur horrible à gravir : 2kms et 500m de D+. Bon ben serre les dents mon grand ça va passer. Au bout de 30 minutes me voilà en haut et tout va toujours. Là un petit moment de déprime quand je me rends compte que le 30 kms replonge vers la droite et en a fini avec l’escalade alors que moi je continue à grimper sur la gauche pour aller chercher un sommet à plus de 2700m…Les paysages sublimes me font vite oublier cela et je repars de plus belle en trottinant dans la montée mais pas pour longtemps…En effet, deux douleurs au niveau des tendons d’Achille me stoppent net. Ma chaîne postérieure n’a pas supporté la montée violente que je viens de manger. Les questions que je me posais avant la course me rattrapent. Je gamberge 2 minutes alors que je n’avance quasiment plus, puis je décide de faire abstraction de la douleur. Si vraiment ça ne passe pas je verrai mais pour le moment on fait comme si de rien n’était. Et deux kilomètres plus tard, plus rien. Tant mieux ! Je continue à grimper et passe le col à 2700 !
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Youpi de la descente ! Un gros morceau en plus. Là j’attaque comme un sauvageons ! «Pardon», «Attention à droite», «Je passe à gauche»…Je me fais vraiment plaisir sur cette partie ultra-technique. Au bout de 2kms ça se radoucit mais je garde le rythme. Contrairement à de nombreux coureurs, je suis le bon itinéraire au niveau du lac, certains ayant manqué une flèche à un croisement. J’atteins le 2e ravito au 25e km en 3h45 avec 1800m de dénivelé dans les jambes. Je commence à accuser le coup…il faut dire que cette année le plus long que j’avais fait c’était 35kms à Maurice avec uniquement 1000m de dénivelé…Je prends un quart d’heure avant de repartir et attaquer la dernière difficulté. 5Kms et 700m de dénivelé. J’ai du mal, et je commence à m’agacer sur des points pas important. Je me calme assez rapidement et continue mon ascension, de toute façon il faudra bien arriver en haut. C’est chose faite en 5h15. Je sais maintenant que mon objectif parfait des 6 heures ne sera pas atteint, mais je savais aussi que le vrai objectif était 6h30. Maintenant place à mon point fort, la descente ! Au programme, plus de 18kms de descente, enfin c’est ce que je croyais…un faux plat montant de 5kms situé 10kms plus loin m’avait échappé sur le profil GPS d’avant course…Pour le moment je relance sur la descente. Mais mon ventre, qui m’avait laissé miraculeusement tranquille pendant toute la course (encore une fois merci Julie) finit par se réveiller. Si je cours trop longtemps ma vésicule biliaire vient taper sur les parois intestinales et me donne de vilaines nausées… j’alterne donc course et marche mais je vois désespérément le temps défiler…Je sers les dents et essaie de relancer dès que je peux.
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Sur le fameux faux plat je marche vite, impossible de courir, 7km/h de moyenne et des minutes qui continuent à s’égrener. Arrive le dernier ravito, celui de La Ramasse, à un peu plus de 40kms de course. Je me détends et attaque la dernière descente très technique. J’envoie d’abord un sms groupé aux potes déjà arrivés depuis longtemps sur les autres courses afin de les prévenir de mon arrivée imminente «A La Ramasse, dans tous les sens du terme !!!» Je repars le couteau entre les dents. Le parcours se situe sur les pistes noires du domaine skiable, un vrai terrain de jeu pour moi, je double pas mal de concurrents ici, assez stupéfaits de voir un bougre dévaler ventre à terre ces pentes vertigineuses. Mes cuisses n’apprécient que moyennement l’effort que je leur fais subir mais on s’en fout, elles se plaindront plus tard ! Une demie heure après me voilà en bas, on m’annonce un dernier faux plat d’un kilomètre…noooon ! Je donne tout ce que j’ai, j’ai hâte de retrouver les amis… je les aperçois à 200 mètres devant moi. Je me dis qu’il faudrait avoir fière allure histoire de dire… «Au diable la fierté, je suis épuisé». Olivier la fusée de la bande me tire sur les derniers hectomètres mais je n’en peux plus…je dois me résoudre à marcher et à me laisser passer par deux coureurs…Je finirai quand même au sprint, car une course qui ne se finit pas au sprint n’est pas une course, parole de sprinteur ! Je m’étale de tout mon long après la ligne d’arrivée, tant et si bien que les sauveteurs me sautent tous dessus… «Non je n’irai pas me reposer au frais, y a le podium de Sandrine dans 5 minutes foutaient moi la paix je vais bien.» Si on n’a même plus le droit de s’allonger après un sprint…où va le monde…
J’aurais donc bouclé ce 50 bornes en 7h23. Déçu du chrono mais tellement satisfait du comportement de mon corps. Le bilan est positif et je serais arrivé à temps pour voir Sandrine ramasser deux coupes !
Ce Trail de l’EDF Cenis Tour aura été pour moi un vrai bol d’air, ressourçant à souhait. Les paysages sont sublimes et le terrain parfait. Maintenant je repars pour la dernière préparation pour La Mascareignes, plus remonté que jamais. Il faudra continuer à peaufiner les détails mais en attendant, keep running.
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Mickaël Mussard, pour Trail Session Magazine, 2013.