Quand on arrive à la fin du mois et qu’il faut faire des choix entre alléger son portefeuille pour sa passion ou l’alléger pour payer les couches au petit et le crédit de la maison, le choix est vite fait (enfin je l’espère pour vous)…mais on se dit que bon sang, notre pratique nous coûte cher !…
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Cher…ça représente quoi au juste ?
Il va de soit que nous n’avons pas tous la même pratique, que nous n’avons pas tous les mêmes attentes et les mêmes motivations, et que de ce fait l’investissement financier de chacun en est différent. Mais j’ai voulu me prêter à l’exercice en évaluant la saison de Trail d’un coureur lambda…Monsieur Lambda. George de son prénom. George Lambda donc, nous l’appellerons ainsi.
Disons que George L. habite à Lyon, plutôt bien placé pour se rendre sur les Trails, qu’il vit en couple mais n’a pas encore d’enfant (qu’il en profite).
Comme c’est un passionné, il pratique, régulièrement, sur tous les terrains…et forcément il use ses chaussures et ses fringues. Il a sa vieille paire d’entrainement, mais doit se racheter en début de saison une nouvelle paire pour les courses, à environ 120 euros, mais aussi quelques fringues car sa femme utilise une très mauvaise lessive et certains de ses vieux short et T-shirt deviennent difficile à porter, même son super short de marque a l’élastique qui se détend ! Plutôt économe George profitera des soldes et de quelques ventes privées sur internet pour se ré-équiper pour 80 euros.
Gling, gling….200 euros
George est jeune, 32 ans, en bonne santé, mais il n’échappe pas à la visite médicale pour le certificat. Fameux passe qui donne le droit de s’inscrire à des courses. Toussez, dites 33 et faite moi un chèque de 23 euros s’il vous plait lui a dit son généraliste.
Gling, gling,…223 euros
L’hiver ça caille, il fait gris, il pleut, et la neige et la boue sur les courses ne sont pas ses tasses de thé à Mister Lambda. Pour lui c’est ski dans la poudreuse et skating pour travailler sa VO2max, mais pas question de commencer la saison avant Avril. En Octobre il fera sa dernière course, parce qu’il commence à faire nuit tôt, et que l’envie de bière dans un pub après le boulot est plus forte que l’entrainement qu’il aura mener de façon assidue depuis avril.
7 mois de course c’est pas mal. Georges fait en moyenne une course par mois, parfois 2, sur lesquelles il se rend avec sa petite voiture citadine à essence :
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Avril : course de reprise à 30km de chez lui sans autoroute – Course saucisson à 15 euros d’inscription et 8 euros d’essence environ allé retour => 23 euros
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Mai : George fait la traditionnelle Nivolet Revard, ça lui coute 26 euros de transport en passant par l’autoroute et 30 euros d’inscription. Mais comme le départ est matinal et qu’il veut être en forme, il prend un nuit à dans un motel à 30 euros => 86 euros
L’euphorie de la Nivolet Revard l’incite à revivre plus rapidement que prévu une nouvelle course, il s’inscrit à une course non loin de chez lui, au sud de Lyon, pour laquelle l’inscription et l’essence lui coûtent à nouveau 25 euros. Un mois de Mai à 111 euros
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Juin : une petite course saucisson à nouveau, non loin de chez lui, restons sur du 25 euros en moyenne. Course de préparation pour le marathon du Mont blanc à la fin du mois, qui là, va lui coûter œil. Mais bon c’est la grande fête du Trail on se fait plaisir !!!
Donc, week-end à Cham, il emmène sa blonde pour ne pas avoir une crise et surtout être sur de pouvoir y retourner l’année prochaine. Comme il s’y est pris un peu à la bourre, le principe à la c…veut qu’il paie un peu plus cher que si il s’était inscrit 2 semaines avant, ça sera donc 56 euros. Va comprendre George. Trajet, 90 euros allez-retour, bim ! Puis faut un logement pas trop mal, car madame n’est pas là pour courir elle => 60 euros la nuit, dans un hôtel pas trop loin du départ, et encore George Lambda s’en sort pas trop mal car son cousin et marié depuis peu avec la nièce du comptable de l’hôtel en question ! Le soir ça sera plat de pâtes dans un resto Chamoniard, menu à 20 euros, car George aime bien prendre une crème brûlée… Un mois de juin à 25 + 56 + 90 + 60 + 20 = 251 euros
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Juillet plus cool, car il part en vacances, mais George est malin, même si on dirait pas au premier abord. Oui il a prévu une destination ou il y avait une course. En arrivant au pays basque, après avoir poser les valises au bungalow, il dit a sa femme… « Tout à l’heure en passant j’ai vu une affiche pour un Trail dans le coin, un petit 30km, ça serait sympa que je le fasse, tu en dis quoi ? » Sa femme, contente d’avoir une matinée peinarde à la plage l’incite fortement à suivre son envie. Disons que là, ça ne lui coûte que l’inscription, un peu cher car en période touristique = 25 euros l’inscription, mais chacun repart avec une bonne tranche de saucisson de pays.
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Aout : back to cham pour la CCC !!! mais cette fois-ci entre potes. Covoiturage et gite pas cher, le trajet ne lui coute que 25 euros, le logement 30, mais l’inscription reste à 110 euros. Et puis il se fait un peu avoir par le business et l’euphorie du moment, et claque 50 euros en matériel lors de la visite du salon (dépense qu’il cachera bien évidemment à sa compagne) => mois d’aout à 25+30+110+50 = 215 euros
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Septembre : récup, pas de course si ce n’est un petit cross a coté de Lyon, 20 euros trajet et inscription. Pfff, broutille.
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Octobre : George fini en beauté sa saison, une bonne course de préparation début de mois du coté de Grenoble, 50 euros de trajet par l’autoroute, 20 euros d’inscription. Course de préparation donc pour le Marathon des Causses sur l’autre terre sainte du Trail, l’Aveyron. Lyon-Millau allé retour, 120 euros, un gite à 40 euros et une inscription un peu abusée de 42 euros. Ça fait mal à George et à son portefeuille, mais bon c’est la dernière. Pour ce coup là pas de resto même si l’aligot saucisse le faisait rêver, ce qui est bien compréhensible. Mois d’octobre à 272 euros.
Nous en sommes donc à :
223+23+111+251+25+215+20+272 = 1140 euros
A cela rajoutons les produits énergétiques que George Lambda a consommé tout au long de la saison, gel, boissons, barres, en course et à l’entrainement, il y en a pour 60 euros.
Gling, gling…1200 euros
Mais n’oublions pas que pour faire une si belle saison, George s’entraîne, il prend sa voiture et part souvent faire des sorties longues dans les montagnes, ce qui ne lui coûte pas moins de 200 euros sur l’année en essence et péage.
Gling, gling…1400 euros.
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Conclusion, 1400 euros. Ça donne une idée, ça vous permet de vous situer, d’extrapoler dans un sens ou dans l’autre. George n’est pas une fashion victime qui saute sur le dernier gadget ou équipement à la mode, ce n’est pas quelqu’un qui recherche un grand confort lors de ses déplacements sur les courses. Son nombre de compétition est dans la moyenne d’un passionné, mais ne couvre que le printemps et l’été, voir début de l’automne, il ne fait pas d’Ultra qui coûtent plus cher (1 euro = 1km pour l’inscription sur les Trails, c’est de la règle !). Bref, on peut vite atteindre pour certains les 2000 euros, voir plus !
A l’inverse vous me direz, on peut aussi faire en sorte de s’en tirer pour beaucoup moins que ça, ne serait ce que si on se cantonne à des courses autour de la maison, ou que l’on vie les courses et les déplacements, en covoiturage, en tente, avec les pâtes cuites au réchaud, ce qui a son charme. Je pense néanmoins que pour un passionné, qui veut se faire un peu plaisir, il est difficile d’alléger la note et de passer sous les 800 euros.
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La pratique est aujourd’hui couteuse et il y a du pouvoir d’achat chez les pratiquants. Les marques l’ont bien compris et exploitent le filon, filon qui paraît inépuisable car il est toujours un peu plus facile pour l’homme de dépenser de l’argent pour sa passion, l’émotion prenant le dessus sur la raison…même si la fin du mois peut être difficile. Cependant si vous en avez les moyens, pourquoi s’en priver, mais pour le Trail comme pour autre chose, évitez de rentrer dans un mode de consommation effréné…le Trail ne se consomme pas, il se pratique.
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Rémy Fabre, Trail Session Magazine, 2013.
C’est exact mais d’un autre côté, les sites internet sont les premiers à vanter tel ou tel nouveau produit, générant sans cesse des envies de consommation chez le trailer.