On nous parle souvent de pratiquer une activité physique pour rester en bonne santé, mais qu’en est-il quand la maladie est là ?….
Vous avez peut-être dans votre entourage plus ou moins proche, une personne avec des problèmes de santé : cancer, diabète, obésité, autres pathologies. Mais bien trop souvent, on pense à tort que pendant la durée d’une maladie, d’un traitement ou d’une rémission, il est impossible de continuer à pratiquer une activité sportive. Nous allons voir ici, comment cela est possible tout est respectant certaines règles sur les conseils de professionnels, avec un encadrement pour et via certaines structures adaptées. Sandrine JOUBERT éducatrice sportive en a fait sa spécialité en se formant auprès de professionnels de la santé et avec la participation de la Ligue contre le Cancer, structure médicale etc…
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Pour en savoir plus, pour permettre à ces personnes de pouvoir intégrer les clubs de sport sans crainte et afin de les accueillir au sein de nos structures sportives tout en les entraînant grâce à une meilleure connaissance de leurs divers problèmes, j’ai demandé à Sandrine de m’expliquer comment elle procédait. Plus que des mots, il est important dans ce cas d’aller sur le terrain pour pouvoir voir, échanger, discuter et avoir l’avis des personnes concernées. C’est donc en immersion totale que Trail Session s’est investi pour vous permettre d’aider les personnes de votre entourage à faire un pas vers une activité sportive. Avant toute chose, il est important de vous présenter Sandrine JOUBERT et d’en savoir plus sur son parcours, son projet mit en route depuis plusieurs mois… et pourquoi pas trouver des aides de sponsors prêts à franchir le pas dans sa démarche. C’est une personne qui a toujours le sourire et au grand cœur que Trail Session va vous faire découvrir.
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Trail Session : Bonjour Sandrine, peut-tu te présenter à nos lecteurs ?
S.J : Bonjour, je suis éducatrice sportive depuis une quinzaine d’années. Mon parcours professionnel m’a permis de côtoyer différents publics, dans différentes structures en faisant appel à une large mosaïque d’activités. Des expériences professionnelles et humaines très enrichissantes…
T.S : Comment est venue l’idée de monter un tel projet ?
S.J : Le projet a vu le jour par le biais du Dr Leblanc, du CHBA, qui m’a sollicité pour mettre en place des activités physiques pour des patients atteints de cancer. C’était en 2011 et depuis j’essaie maladroitement de développer le Sport Santé, qui s’adresse à toutes les personnes ayant un problème de santé (maladies chroniques, problèmes de dos, surpoids…) qui les empêchent de pratiquer dans les structures existantes car inadaptées. Depuis peu je suis sollicitée par le corps médical pour encadrer des personnes souffrant d’obésité et de diabète mais il n’y a, à ce jour, pas de structures pour les accueillir car pas de moyens pour prendre en charge mes interventions.
T.S : Quels ont été tes démarches pour te permettre de faire faire une activité sportive à ces personnes ?
S.J : Tout d’abord j’ai cherché s’il y avait déjà des structures existantes, des projets, des formations… et le résultat n’était pas très concluant ou lointain géographiquement parlant (cela a quand même évolué en 2 ans et dans le bon sens). J’ai ensuite commencé à tisser mon réseau dans le milieu médical. J’ai la chance d’être soutenue et aidée par des ostéopathes et kinés qui m’ont permis de me lancer concrètement dans ce projet. Je trouve auprès d’eux une formation complémentaire et constante qui m’est nécessaire pour mieux appréhender mes séances et je les remercie de croire autant en moi. Les premières séances ont pu voir le jour dans leur cabinet à Ploeren, car ils ont eu la gentillesse de me laisser à disposition leur salle de rééducation et leur matériel. Ensuite, j’ai pu créer un partenariat avec La Ligue contre le cancer, qui m’a beaucoup aidé dans la promotion du projet et qui m’a ouvert des portes auparavant difficiles à franchir. Il y a un créneau par semaine mis en place avec eux. Depuis quelques mois un autre partenariat s’est mis en place avec le magasin Sobhi Sport. Leurs soirées « Voulez-vous courir avec moi ce soir ? » sont l’occasion d’organiser une marche en parallèle des footings. Depuis cette année, je travaille en collaboration avec Profession Sport 56, qui a contribué à développer ce même type de projet sur le secteur de Lorient et qui a lancé un appel aux associations et collectivités pour la rentrée prochaine.
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T.S : Que proposes-tu comme activités ?
S.J : Les activités varient en fonction des objectifs, du matériel, du groupe et de la période de l’année. Mais en gros, pour le moment c’est de la marche, en attendant de pouvoir trottiner pour certaines, de la gym douce, de la zumba… oui oui de la zumba et je peux vous dire qu’on s’éclate bien ! J’essaie de faire un travail global, qui vise à améliorer un maximum de qualités physiques (endurance, souplesse, équilibre, coordination…). En fait, l’activité s’adapte constamment aux personnes présentes, à leur état de santé et la forme du jour. C’est pour cela qu’il est important d’avoir un groupe restreint, cela permet une meilleure prise en charge. J’en profite pour préciser que l’on parle d’activité physique et non pas de sport ! L’activité sportive est une des formes de l’activité physique, qui s’étend à l’activité professionnelle, de loisirs ou domestique (tâches ménagères, jardinage…). Dès lors que le corps se met en mouvement je suis dans l’activité physique, avec une dépense énergétique plus ou moins élevée en fonction de l’intensité de l’activité.
T.S : Quels sont les motivations de ces personnes ?
S.J : Elles vous le diront mieux que moi mais ces personnes ont traversé et traversent encore des moments très pénibles. Leur vie, leurs repères, leur corps, leurs projets… tout a été chamboulé et remis en question par une maladie qu’elles ne pouvaient pas maîtriser. Lorsqu’elles sont prêtes à redevenir actrices de leur vie, elles ont besoin de tout essayer pour se sentir mieux. L’activité physique en fait partie ! Je salue leur courage car la démarche n’est pas facile, c’est un pas de géant, et c’est encore plus courageux lorsque le sport n’a jamais fait partie de leurs habitudes. Elles recherchent un mieux-être, une amélioration de leur condition physique, un besoin de se réapproprier ce corps qui les a lâché un temps et en qui elles doivent retrouver confiance…
T.S : Pourquoi n’osent-elles pas franchir la porte des clubs ?
S.J : Certaines l’ont déjà fait et ont été déçues, les structures ne sont pas adaptées pour les recevoir, les éducateurs sportifs ne sont pas formés pour les accueillir. C’est difficile de parler de sa maladie à des inconnus, surtout lorsqu’on veut tourner la page. La confiance doit s’instaurer, elles ne veulent pas être stigmatisées. Elles doivent être sûres que la personne qui leur fait face connaît la pathologie et saura s’y adapter. Je pense qu’il y a la peur de l’incompréhension, du regard de l’autre, de ne pas y arriver, de ralentir le groupe, de se faire mal et de mal faire…
T.S : Penses-tu qu’en sachant qu’un club de sports serait prêt à les accueillir en ayant pris par sur le comment les encadrer/entraîner, elles oseront franchir le pas ?
S.J : La réponse leur appartient… mais je ne vois pas pourquoi ça ne serait pas le cas. Le chemin est plus ou moins long selon les personnes, il faut leur laisser du temps, respecter le rythme de chacune pour leur permettre de s’épanouir. Mon objectif est là aussi, pour l’instant je ne suis qu’une passerelle, une bouée que l’on va lâcher peu à peu quand la nage sera acquise et que la peur sera restée sur le bord !
T.S : On peut se douter qu’il s’agit bien souvent d’un coaching particulier et au cas par cas. Mais t’arrive t-il de faire faire une séance unique pour des personnes en surpoids, en rémission, atteinte de cancer etc… ou cela est impossible pour le moment ?
S.J : Pour l’instant il n’y a que le créneau proposé par la Ligue contre le Cancer donc uniquement tourné vers cette pathologie. J’interviens également en coaching individuel ou en groupe, pour des personnes ayant des objectifs précis (amélioration de la santé, performances et compétition, reprise d’activité). Comme je le disais plus haut, je suis sollicitée pour m’occuper d’autres publics mais le manque de moyen est toujours un frein au développement de ce projet.
T.S : Si une personne souhaitait faire la même chose que toi, que lui conseilles-tu ? (diplômes, démarches, formations etc…)
S.J : Il existe, entre autre, des formations universitaires telles que l’APA Santé (Activités Physiques Adaptées). Mais s’occuper des personnes ayant un problème de santé n’est, je pense, pas donné à tout le monde… Cela va au-delà des compétences professionnelles et des diplômes, c’est comme de s’occuper de la petite enfance ou des séniors, il faut se sentir prêt et avoir envie de s’investir dans cette page de vie.
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T.S : Pour toi, que manque-t-il pour faire avancer les choses et ainsi en faire un vrai métier ?
S.J : C’est déjà un vrai métier et depuis longtemps, je n’ai rien inventé, seulement on en parle beaucoup plus aujourd’hui. Je pense qu’il manque de la coordination et du lien entre les dispositifs déjà existants car on ne peut pas dire que cela ne bouge pas.
T.S : Entraîner est une chose mais être confronté à différentes pathologies t’a demandé d’aller te former, de rencontrer des professionnels de la santé car il y a différents paramètres à prendre en compte pour chaque pathologie. Serais-tu prêtes à former une personne pour t’aider dans tes démarches et pourquoi ne pas monter une structure qui pourrait être relayé dans d’autres régions ?
S.J : Une réflexion est en cours entre le Centre Médico Sportif de Bretagne Sud et Profession Sport 56 sur l’accueil de publics sédentaires et/ou présentant des problèmes de santé. Les objectifs étant de créer un outil d’orientation vers les structures qui accueillent, une sorte de répertoire, et de mettre en place un accompagnement de ces structures (formations, aide à la mise en place d’un accueil…).
T.S : En espérant que l’article soit lu, relayé par de nombreuses personnes, marques, structures qui pourraient éventuellement devenir sponsor ou partenaire de ton projet, que te faudrait-il ?
S.J : Si les associations ne répondent pas favorablement et que les collectivités ne s’engagent pas davantage, il n’y a pas beaucoup de solutions… Créer une structure privée est un énorme challenge pour lequel il faut avoir de solides soutiens, et financiers et gestionnaires !
T.S : Et pour le final que voudrais-tu rajouter ?
S.J : A toutes les personnes qui souhaitent pratiquer une activité physique, peu importe ce qui les freine, il ne faut surtout pas avoir peur de se lancer, tout peut être adapté et tout le monde peut y arriver. Il faut seulement respecter son rythme et accepter ses limites, de toute façon on ne peut que progresser !!!
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Pour comprendre, en savoir plus, il était très important d’aller au contact de ces personnes. Vous vous en doutez, il n’est pas facile pour elles de se confier, de venir parler à une personne extérieure, c’est pourquoi Sandrine à tenue à avoir leur approbation sur ma venue après une séance. Arrivée sur place, je vois des femmes certes malade mais avec un grand sourire. Elles sont toutes heureuses d’être là, d’avoir terminé une séance qui ne les aura pas ménagée.
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J’ai pu recueillir le témoignage de Sylvie, 45 ans, et d’une de ses amies. C’est avec un regard pétillant et un large sourire qu’elles m’ont toutes deux répondus. J’ai pu discuter avec deux femmes battantes, que la vie n’a pas épargnées mais dégageant une très grande énergie !
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Trail Session : Comment êtres-vous arrivés ici ?
Sylvie : C’est grâce à la Ligue contre le Cancer que je suis arrivée ici. Il y a d’autres activités comme la sophrologie, la marche mais je voulais une activité qui bouge, avant je faisais de la natation, malheureusement je ne peux plus la pratiquer pour le moment. Et on peut dire que Sandrine ne nous ménage pas. On redécouvre nos corps et nos muscles après une séance.
Son amie : Moi c’est grâce au bouche-à-oreille. Je connaissais certaines filles avant de venir ici, elles m’en ont parlé et du coup on se retrouve ici les jeudis après-midi.
T.S : Qu’est ce que vous apporte cette activité au quotidien et est-ce important pour vous de venir ici chaque jeudi ?
S. et son amie : Cela permet d’avoir un lien entre nous, on peut parler, échanger sur notre maladie, les recours à d’autres médecines, des petits trucs entre nous. On se comprend. Au début cela a été dur de reprendre une activité car le corps a subi beaucoup de changements à cause de la maladie, des traitements, de la prise de poids. Cela nous aide beaucoup moralement, ça m’a ouvert l’esprit sur la gym, la zumba…. Et puis Sandrine transmet tellement d’énergie, elle donne énormément et son sourire est une réelle motivation. C’est un besoin, un rendez-vous incontournable, c’est un lien avec la vie. On reprend de l’énergie et cette énergie revient. On a besoin de venir régulièrement, cela permet de sortir de chez soi ; car il faut savoir qu’au début on reste chez soi.
T.S : Quels sont les blocages qui pourraient vous empêcher actuellement d’intégrer un club sportif ?
S. : Le regard des autres… le regard des autres m’empêcherait de franchir la porte, ici on se comprend toutes. Et puis pour le moment il est difficile de se projeter dans l’avenir et ainsi commencer une année complète dans un club. Il faudrait surtout que les personnes qui encadrent soit peut-être formés et qu’ils ne poussent pas plus à l’effort quand on peut plus. Sandrine ne nous ménage peut-être pas mais elle est au courant de nos difficultés et en aucun cas elle dira à une fille de forcer, c’est ça qui est bien !
Son amie : Pour moi je ne vois aucune contrainte pour aller dans un club, se serait bien sur dans une petite structure. Et surtout avec des personnes comme ici, où il y a un échange et pas juste basé sur soi et ses propre performances, mais je ne vois aucun blocage pour ne pas y aller.
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Vous l’aurez compris, il est très important que ces personnes soient accompagnées par une personne compétente, expérimenté afin de ne pas faire n’importe quoi. En aucun cas Sandrine ne les dirigera vers un club, si elles ne sont pas prêtes et si les clubs ne sont pas préparés ! Mais il est très important pour elles de pratiquer une activité sportive c’est pourquoi Sandrine se bat pour pouvoir, dans l’idéal monter une structure privée pouvant accueillir parents/enfants, des personnes avec d’autres pathologies médicales. Il serait judicieux que les collectivités locales fassent un pas en avant afin de financer avec l’aide de divers partenaires, sponsors une structure plus adaptée avec du matériel adéquat.
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